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Les maux de la guerre :
Voyage au bout de la nuit, Louis Ferdinand Céline.
Ces Allemands accroupis sur la route, têtus et tirailleurs, tiraient mal, mais ils semblaient avoir des balles
à en revendre, des pleins magasins sans doute. La guerre décidément, n’était pas terminée ! Notre
colonel, il faut dire ce qui est, manifestait une bravoure stupéfiante ! Il se promenait au beau milieu de la
chaussée et puis de long en large parmi les trajectoires aussi simplement que s’il avait attendu un ami
sur le quai de la gare, un peu impatient seulement.
Moi d’abord la campagne, faut que je le dise tout de suite, j’ai jamais pu la sentir, je l’ai toujours
trouvée triste, avec ses bourbiers qui n’en finissent pas, ses maisons où les gens n’y sont jamais et ses
chemins qui ne vont nulle part. Mais quand on y ajoute la guerre en plus, c’est à pas y tenir. Le vent
s’était levé, brutal, de chaque côté des talus, les peupliers mêlaient leurs rafales de feuilles aux petits
bruits secs qui venaient de là-bas sur nous. Ces soldats inconnus nous rataient sans cesse, mais tout en
nous entourant de mille morts, on s’en trouvait comme habillés. Je n’osais plus remuer.
Le colonel, c’était donc un monstre ! À présent, j’en étais assuré, pire qu’un chien, il n’imaginait pas
son trépas ! Je conçus en même temps qu’il devait y en avoir beaucoup des comme lui dans notre armée,
des braves, et puis tout autant sans doute dans l’armée d’en face. Qui savait combien ? Un, deux,
plusieurs millions peut-être en tout ? Dès lors ma frousse devint panique. Avec des êtres semblables,
cette imbécillité infernale pouvait continuer indéfiniment... Pourquoi s’arrêteraient-ils ? Jamais je n’avais
senti plus implacable la sentence des hommes et des choses.
Serais-je donc le seul lâche sur la terre ? pensais-je. Et avec quel effroi !... Perdu parmi deux millions
de fous héroïques et déchaînés et armés jusqu’aux cheveux ? Avec casques, sans casques, sans chevaux,
sur motos, hurlants, en autos, sifflants, tirailleurs, comploteurs, volants, à genoux, creusant, se défilant,
caracolant dans les sentiers, pétaradant, enfermés sur la terre, comme dans un cabanon, pour y tout
détruire, Allemagne, France et Continents, tout ce qui respire, détruire, plus enragés que les chiens,
adorant leur rage (ce que les chiens ne font pas), cent, mille fois plus enragés que mille chiens et
tellement plus vicieux ! Nous étions jolis ! Décidément, je le concevais, je m’étais embarqué dans une
croisade apocalyptique.
Voyage au bout de la nuit - Louis-Ferdinand Céline - Extrait
Questions :
1)Quels sont « ces bruits secs « évoqués par Bardamu ?
2) Que diriez-vous de la question que se pose Bardamu ? (soulignée dans le texte).
3) Que comprenez-vous ?
4) Quelle est le temps et la valeur de « serais-je »
5) Donnez trois figures de style présentes dans le dernier paragraphe.
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Réponse :
1) Les bruits secs sont les bruits des balles.
2) "cette imbécillité infernale pouvait continuer indéfiniment... Pourquoi s’arrêteraient-ils ?"
3) Je dirais que c'est une fausse question.
Je comprends : ils ne s'arrêteront jamais.
4) "Serais-je donc le seul lâche sur la terre ? pensais-je."
Conditionnel présent. Supposition.
5) Trois figures de style :
" Avec casques, sans casques, sans chevaux, sur motos, hurlants, en autos, sifflants, tirailleurs, comploteurs, volants, à genoux, creusant, se défilant,
caracolant dans les sentiers, pétaradant, enfermés sur la terre, comme dans un cabanon, pour y tout détruire, Allemagne, France et Continents ..."
Des énumérations
Nous étions jolis. Antiphrase ironique
"cent, mille fois plus enragés que mille chiens" hyperbole
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Explications :