Dans ma famille, je suis le petit bourgeois. Cela tient surtout au fait que mes parents ne l’ont jamais été. Lorsque j’avais 10 ans, mon père se faisait teindre les cheveux tantôt en vert tantôt en bleu et marchait avec un blouse en cuir de la même couleur. Ma mère adorait par-dessus tout porter un képi de l’armée soviétique. Ils ressemblaient tous deux à deux personnages sortis tout droit d’une pièce de théâtre. Mes copains trouvaient que mes parents étaient décontractés et me prenaient pour un Homme heureux. Mais je trouvais ça pénible et ne me souhaitais rien d’autre qu’ils puissent être un jour aussi normaux que les autres parents que je connaissais. Je préférais ceux de Sven, mon meilleur ami. Le père de Sven avait une calvitie et un petit ventre. Sven était autorisé à l’appeler papa et laver la voiture avec lui le week-end.

Mon père ne s’appelait pas papa mais Wolf. Je devais appeler ma mère Anna. Les parents de Sven avaient la télévision en couleurs, un salon et une bibliothèque. Dans notre salon, il n’y avait que des étagères à livres et des bancs d’angle. L’assise était quelques peu ferme parce que Wolf pensait que que l’on n’avait pas besoin de tout ce confort, lorsqu’on a quelque chose à se dire. Un jour, j’ai dessiné un plan de la salle de séjour comme je l’aurais souhaité. Un appartement avec un salon, un télévisieur en couleurs et une bibliothèque. Wolf se moqua de moi lorsqu’il vit la scène parce que la famille du policier qui avait vécu là avant nous, avait aménagé l’appartement tel que je l’avais pensé. Il m’expliqua que c’était idiot et parfois même dangereux, de toujours faire ce que les autres font car on ne pourrait plus mener sa propre vie tel qu’on l’entend.