L’expression "joindre la parole aux actes" exprime bien ce lien qui unit l’agir et le dire, brisé lorsqu’il nous condamne soit à une action irraisonnée soit, pour le dire selon la formule de Charles Péguy, nous rend "murs pour toutes les capitulations" en nous limitant à des délibérations sans fin. D’autant qu’un tel lien, souhaitable pour la raison, et qui plus est un phénomène irréfutable de notre vie psychologique : l’acte de parole, en tant précisément qu’il est activité, suppose un certain degré d’efficacité sur le réel. Nous pouvons ainsi espérer exercer une influence sur autrui qui ne soit pas de l’ordre de la contrainte physique, ni même d’une contrainte qui ne reposerait que sur des rapports de classes, tout comme nous pouvons régler certain troubles en les exprimant ou en permettant qu’ils s’expriment chez autrui.
En reprenant les paroles de Sartre quand il définit la parole comme "un certain moment particulier de l'actio", c'est que la parole dénuée d'action est creuse, vide, et s'apparente au bavardage. Cependant, à l'inverse, une parole uniquement tournée vers l'action, sans dimension réflexive, est vouée à un activisme stérile. En fait, "moment" dee l'action, la parole l'est en ce qu'elle peut diriger l'action, la maîtriser ou l'éclairer dans l'accès qu'elle ouvre à la connaissance. Mais on peut aller plus loin encore et refuser la distinction entre parole et action sur laquelle se fonde la position sartrienne : la parole peut constituer une action à part entière - et au fond, les œuvres littéraires sont-elles autre chose que cette action, de création, de mise en jeu des idées, bref, une action de la subjectivité se manifestant par la parole ?
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Bonjour,
L’expression "joindre la parole aux actes" exprime bien ce lien qui unit l’agir et le dire, brisé lorsqu’il nous condamne soit à une action irraisonnée soit, pour le dire selon la formule de Charles Péguy, nous rend "murs pour toutes les capitulations" en nous limitant à des délibérations sans fin. D’autant qu’un tel lien, souhaitable pour la raison, et qui plus est un phénomène irréfutable de notre vie psychologique : l’acte de parole, en tant précisément qu’il est activité, suppose un certain degré d’efficacité sur le réel. Nous pouvons ainsi espérer exercer une influence sur autrui qui ne soit pas de l’ordre de la contrainte physique, ni même d’une contrainte qui ne reposerait que sur des rapports de classes, tout comme nous pouvons régler certain troubles en les exprimant ou en permettant qu’ils s’expriment chez autrui.
En reprenant les paroles de Sartre quand il définit la parole comme "un certain moment particulier de l'actio", c'est que la parole dénuée d'action est creuse, vide, et s'apparente au bavardage. Cependant, à l'inverse, une parole uniquement tournée vers l'action, sans dimension réflexive, est vouée à un activisme stérile. En fait, "moment" dee l'action, la parole l'est en ce qu'elle peut diriger l'action, la maîtriser ou l'éclairer dans l'accès qu'elle ouvre à la connaissance. Mais on peut aller plus loin encore et refuser la distinction entre parole et action sur laquelle se fonde la position sartrienne : la parole peut constituer une action à part entière - et au fond, les œuvres littéraires sont-elles autre chose que cette action, de création, de mise en jeu des idées, bref, une action de la subjectivité se manifestant par la parole ?