Les Lettres persanes sont des échanges fictifs entre deux Persans, Rica et Isben, qui découvrent les mœurs de la France au XVIIIème siècle. Dans cette lettre, Rica raconte la réponse d’un philosophe français à la question : est-il naturel que les hommes exercent leur domination sur les femmes ?

Rica à Ibben, A Smyrne

C’est une autre question de savoir si la loi naturelle soumet les femmes aux hommes. ‘Non, me disait l’autre jour un philosophe très galant : la Nature n’a jamais dicté une telle loi. L’empire que nous avons sur elles est une véritable tyrannie; elles ne nous l’ont laissé prendre que parce qu’elles ont plus de douceur que nous, et par conséquent, plus d’humanité et de raison. Ces avantages qui devaient sans doute leur donner la supériorité, si nous avions été raisonnables, la leur ont fait perdre, parce que nous ne le sommes point. Or, s’il est vrai que nous n’avons sur les femmes qu’un pouvoir tyrannique, il ne l’est pas moins qu’elles ont sur nous un empire naturel : celui de la beauté, à qui rien ne résiste. Le nôtre n’est pas de tous les pays; mais celui de la beauté est universel. Pourquoi aurions-nous donc un privilège ? Est-ce parce que nous sommes les plus forts ? Mais c’est une véritable injustice. Nous employons toutes sortes de moyens pour leur abattre le courage; les forces seraient égales si l’éducation l’était aussi.

A Paris le 26 de la lune de Gemmadi, 1713

Montesquieu, Lettres persanes, Lettre XXXVIII, 1721


qui parle ?
à qui ?
où ?
quand ?
comment le propos est-il tenu ?
quelle est la tonalité ?
Please enter comments
Please enter your name.
Please enter the correct email address.
You must agree before submitting.

Helpful Social

Copyright © 2024 ELIBRARY.TIPS - All rights reserved.