Le salon que Jeanne Marie Philipon (1754-1793), dite Madame Roland, tenait rue Guénégaud illustre bien cette sociabilité politique nouvelle qui s’est mise en place au moment de la Révolution. Johann Ernst Heinsius, peintre de genre allemand émigré en France, où il était réputé pour ses portraits de femmes, tout spécialement dans les cercles de la cour, a laissé de Madame Roland un portrait en médaillon d’une facture préromantique. Représentée simplement vêtue d’une robe au large décolleté découvrant les épaules, les cheveux lâchés tombant en cascade, celle-ci était issue du milieu de l’artisanat d’art par son père, maître graveur place Dauphine. Dotée d’une grande aptitude pour les études, elle se passionne dès son plus jeune âge pour la lecture et lit les philosophes des Lumières, notamment Montesquieu, Voltaire et surtout Rousseau, qui fut son maître. Très vite, elle adhère aux idéaux républicains.
En 1776, elle rencontre Jean-Marie Roland de La Platière, inspecteur des manufactures, et l’épouse en 1780. De 1780 à 1789, les époux habitent Amiens, puis Lyon, et Madame Roland seconde son mari dans ses travaux durant ces années. Toute acquise aux idéaux de 1789, elle s’engage politiquement et, depuis Lyon, encourage la mise en place d’un réseau de sociétés populaires et la tenue de fédérations des clubs de chaque département. Revenue définitivement à Paris avec son mari en février 1791, Madame Roland organise à son domicile, rue Guénégaud, un salon qui attire une kyrielle d’hommes politiques de l’extrême gauche comme Robespierre, Pétion, Desmoulins ou Brissot. Lieu mondain à la mode, son salon fut l’un des creusets de l’élaboration de la politique girondine, tandis que, grâce à ses relations avec les Girondins, Roland de La Platière est nommé ministre de l’Intérieur le 23 mars 1792.
Devenue l’égérie des Girondins, Madame Roland oriente la politique de son mari, rédigeant notamment en son nom la célèbre lettre au roi du 10 juin 1792 dans laquelle Roland adjure le roi de renoncer à son veto et de sanctionner les décrets, lettre qui lui valut d’être renvoyé trois jours plus tard. Après le 10 août 1792 qui consacre la chute de la monarchie, Roland est rappelé au ministère, mais, devant les attaques de plus en plus virulentes des Montagnards, qui lui reprochent son inertie, il finit par démissionner le 23 janvier 1793.
Après le départ de son mari du ministère, Madame Roland, qui entretient une liaison platonique avec Buzot, l’un des orateurs du parti girondin, continue de jouer un rôle dans la politique girondine. Lors de la chute de la Gironde, le 2 juin 1793, elle est décrétée d’arrestation comme son mari. Tandis qu’il parvient à se réfugier à Rouen, elle se laisse arrêter. Libérée le 24 juin, elle est à nouveau incarcérée le jour même et, dans l’attente de son jugement, rédige à la Conciergerie des Mémoires qui constituent un témoignage exceptionnel sur l’histoire de la Gironde comme sur son engagement personnel dans la politique. Jugée le 8 novembre 1793 pour avoir participé à la conspiration contre la République, Madame Roland est condamnée à mort et exécutée le soir même sur l’échafaud.
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Madame Roland, l’égérie de la Gironde
Le salon que Jeanne Marie Philipon (1754-1793), dite Madame Roland, tenait rue Guénégaud illustre bien cette sociabilité politique nouvelle qui s’est mise en place au moment de la Révolution. Johann Ernst Heinsius, peintre de genre allemand émigré en France, où il était réputé pour ses portraits de femmes, tout spécialement dans les cercles de la cour, a laissé de Madame Roland un portrait en médaillon d’une facture préromantique. Représentée simplement vêtue d’une robe au large décolleté découvrant les épaules, les cheveux lâchés tombant en cascade, celle-ci était issue du milieu de l’artisanat d’art par son père, maître graveur place Dauphine. Dotée d’une grande aptitude pour les études, elle se passionne dès son plus jeune âge pour la lecture et lit les philosophes des Lumières, notamment Montesquieu, Voltaire et surtout Rousseau, qui fut son maître. Très vite, elle adhère aux idéaux républicains.
En 1776, elle rencontre Jean-Marie Roland de La Platière, inspecteur des manufactures, et l’épouse en 1780. De 1780 à 1789, les époux habitent Amiens, puis Lyon, et Madame Roland seconde son mari dans ses travaux durant ces années. Toute acquise aux idéaux de 1789, elle s’engage politiquement et, depuis Lyon, encourage la mise en place d’un réseau de sociétés populaires et la tenue de fédérations des clubs de chaque département. Revenue définitivement à Paris avec son mari en février 1791, Madame Roland organise à son domicile, rue Guénégaud, un salon qui attire une kyrielle d’hommes politiques de l’extrême gauche comme Robespierre, Pétion, Desmoulins ou Brissot. Lieu mondain à la mode, son salon fut l’un des creusets de l’élaboration de la politique girondine, tandis que, grâce à ses relations avec les Girondins, Roland de La Platière est nommé ministre de l’Intérieur le 23 mars 1792.
Devenue l’égérie des Girondins, Madame Roland oriente la politique de son mari, rédigeant notamment en son nom la célèbre lettre au roi du 10 juin 1792 dans laquelle Roland adjure le roi de renoncer à son veto et de sanctionner les décrets, lettre qui lui valut d’être renvoyé trois jours plus tard. Après le 10 août 1792 qui consacre la chute de la monarchie, Roland est rappelé au ministère, mais, devant les attaques de plus en plus virulentes des Montagnards, qui lui reprochent son inertie, il finit par démissionner le 23 janvier 1793.
Après le départ de son mari du ministère, Madame Roland, qui entretient une liaison platonique avec Buzot, l’un des orateurs du parti girondin, continue de jouer un rôle dans la politique girondine. Lors de la chute de la Gironde, le 2 juin 1793, elle est décrétée d’arrestation comme son mari. Tandis qu’il parvient à se réfugier à Rouen, elle se laisse arrêter. Libérée le 24 juin, elle est à nouveau incarcérée le jour même et, dans l’attente de son jugement, rédige à la Conciergerie des Mémoires qui constituent un témoignage exceptionnel sur l’histoire de la Gironde comme sur son engagement personnel dans la politique. Jugée le 8 novembre 1793 pour avoir participé à la conspiration contre la République, Madame Roland est condamnée à mort et exécutée le soir même sur l’échafaud.