Mathurin Régnier (1573-1613)
François Malherbe (1555-1628)
poèmes :
Marc-Antoine Girard de Saint-Amant
Assis sur un fagot, une pipe à la main,
Tristement accoudé contre une cheminée,
Les yeux fixés vers terre, et l’âme mutinée,
Je songe aux cruautés de mon sort inhumain.
L’espoir, qui me remet du jour au lendemain,
Essaie à gagner du temps sur ma peine obstinée,
Et me venant promettre une autre destinée
Me fait monter plus haut qu’un empereur romain.
Mais à peine cette herbe est-elle mise en cendre,
Qu’en mon premier état il me convient descendre,
Et passer mes ennuis à redire souvent:
Non, je ne trouve point beaucoup de différence
De prendre du tabac à vivre d’espérance,
Car l’un n’est que fumée, et l’autre n’est que vent.
_________________________________________
Honoré d'Urfé
Je voudrais bien être vent quelquefois
Pour me jouer aux cheveux d'Uranie,
Puis être poudre aussitôt je voudrais,
Quand elle tombe en sa gorge polie.
Soudain encor je me souhaiterais
Pouvoir changer en cette toile unie
Qui va couvrant ce beau corps que je dois
Nommer ma mort aussitôt que ma vie.
Ces changements plairaient à mon désir,
Mais pour avoir encor plus de plaisir,
Je voudrais bien puce être devenue,
Je baiserais ce corps que j'aime tant,
Et la forêt à mes yeux inconnue
Me servirait de retraite à l'instant.
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Mathurin Régnier (1573-1613)
François Malherbe (1555-1628)
poèmes :
Marc-Antoine Girard de Saint-Amant
Assis sur un fagot, une pipe à la main,
Tristement accoudé contre une cheminée,
Les yeux fixés vers terre, et l’âme mutinée,
Je songe aux cruautés de mon sort inhumain.
L’espoir, qui me remet du jour au lendemain,
Essaie à gagner du temps sur ma peine obstinée,
Et me venant promettre une autre destinée
Me fait monter plus haut qu’un empereur romain.
Mais à peine cette herbe est-elle mise en cendre,
Qu’en mon premier état il me convient descendre,
Et passer mes ennuis à redire souvent:
Non, je ne trouve point beaucoup de différence
De prendre du tabac à vivre d’espérance,
Car l’un n’est que fumée, et l’autre n’est que vent.
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Honoré d'Urfé
Je voudrais bien être vent quelquefois
Pour me jouer aux cheveux d'Uranie,
Puis être poudre aussitôt je voudrais,
Quand elle tombe en sa gorge polie.
Soudain encor je me souhaiterais
Pouvoir changer en cette toile unie
Qui va couvrant ce beau corps que je dois
Nommer ma mort aussitôt que ma vie.
Ces changements plairaient à mon désir,
Mais pour avoir encor plus de plaisir,
Je voudrais bien puce être devenue,
Je baiserais ce corps que j'aime tant,
Et la forêt à mes yeux inconnue
Me servirait de retraite à l'instant.