Bonsoir pouvez vous m'aidez à faire un plan svp Je mets mon panier de mendiante devant moi et j’attends en murmurant des prières, derrière les colonnes, sur les toits je vois les gamins d’hier et beaucoup d’autres qui me regardent comme si quelque chose devait se produire. Je les oublie, je ne les vois plus ni ceux qui passent et qui me jettent peut-être quelques sous. Toute mon attention est requise par ce qui se passe en moi et qui vient de bien plus profond. Il y a une colère, une étrange et brusque fureur qui grandit en traversant mon corps et va produire un cri. Le cri d’un enfant malingre, enfermé, abandonné dans une cave et qui entrevoit, à travers les millénaires ténébreux, l’espérance de ceux qui sont nés pour elle et qui en ont été indéfiniment exilés. Le cri progresse sauvagement en moi, il me déchire, il me brise sur un sol sans devenir et me force à verser mes larmes les plus dures. Le cri, le crime, plane au-dessus de la ville et il n’est plus question de le retenir mais seulement de l’expulser en douleur et en vérité pendant tout le temps qu’il exigera pour naître. Je suis perdue, plus perdue que jamais dans l’obscurité de mon existence mais je sens que je ne suis plus seule. Des gens, beaucoup de gens sont accourus à mon appel, certains pleurent avec moi, d’autres m’apportent une part de ce qu’ils croyaient à eux et ne peuvent plus garder. Je voudrais les remercier, leur dire : Assez, c’est assez ! Je ne peux plus retenir un autre cri, le second qui ressemble à celui d’une femme en amour ou d’une ville forcée. J’entends les gens autour de moi. Je reconnais la voix tremblante de la boulangère qui dit « Arrête, Antigone, ou je te donnerai tout. Tout ce que je devrais vendre. Mon mari ne t’entend pas, certains, c’est incroyable, ne t’entendent pas. Si je te donne plus, il me battra à mort. Henry Bauchau, Antigone, chapitre XIII « le cri ».
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